L’actualité sociale depuis quelques jours au Bénin reste focalisée sur les marches initiées par les centrales syndicales. La première tentative du 27 avril 2024 légèrement perturbée par les éléments de la police républicaine n’a pas émoussé les ardeurs des citoyens. Bis repetita le 1er mai dernier. Ce jour-là, 73 personnes ont été interpellées et gardées à vue. À l’arrivée, il ne reste plus que 21 marcheurs dans les liens de la détention en attendant leur jugement. À en croire Jules Ahoga, Procureur de la République près le Tribunal de Cotonou, ces marcheurs qui n’ont pas pu justifier leur qualité de travailleurs, seraient sous l’emprise d’un stupéfiant, notamment le cannabis. Vrai ou faux ? Nul ne serait le dire mais la seule certitude qui se dessine après ces épisodes est claire et limpide : la rupture affiche de façon ostentatoire, une aversion particulière aux marches. Et pourtant…
Le tout répressif pourrait-il être la solution face au ras- le-bol des masses laborieuses qui subissent de plein fouet, les affres de la cherté de la vie ? Bien évidemment NON ! Mieux, pour des gens qui ont contribué fortement avant 2016 aux nombreuses spirales de déferlements populaires dans les grandes villes du pays, c’est à croire qu’ils sont devenus subitement amnésiques. Le cas échéant, les images ou vidéos sont là, témoins irréfutables d’un passé têtu qui colle telle une sangsue à la peau des donneurs de leçons d’aujourd’hui qui se retrouvent accidentellement du bon côté de l’histoire. On se rappelle que le régime défunt est resté de marbre face aux mouvements »mercredi rouge » et bien d’autres mouvements syndicaux suscités par une célèbre »télécommande » ultra puissante. Au nom de la liberté, Pascal Todjinou, Feu Dieudonné Lokossou, Paul Essè Iko et d’autres figures emblématiques de la société civile pouvaient battre le macadam, chanter et danser sans être inquiétés par les forces de défense et de sécurité.
Sous la rupture, après plus de huit années de cloisement syndical, impossible à Kassa Mampo, Noël Chadaré, Anselme Amoussou et consorts de se défouler, le temps d’une marche pour dire haut et fort leur amertume contre la hausse vertigineuse des prix des produits de première nécessité.
Le prochain rendez-vous important pour juger une énième fois le régime en place sur les questions relatives aux libertés, c’est bien évidemment le 11 mai prochain, date prévue par les syndicalistes pour redescendre dans les rues. Vont-ils enfin marcher librement ? Le gouvernement dans sa logique connue de tous va-t-il maintenir son mot d’ordre à travers la police républicaine ?
Pendant ce temps, maïs, piment, haricot, essence… continuent d’être inaccessibles aux pauvres populations. Le panier de la ménagère reste despérément vide et le quotidien des béninois n’est guère reluisant. Finalement, la solution est-elle vraiment dans les rues ?
Ignace NATONNAGNON