Le débat autour d’une loi d’amnistie refait surface au sein de la classe politique béninoise. Alors que les figures de l’opposition réclament à nouveau l’examen d’une proposition de loi en faveur de Joël Aïvo, Reckya Madougou et d’autres personnalités incarcérées, le député Orden Alladatin, président de la Commission des Lois à l’Assemblée nationale, livre sa position qui n’est pas en accord avec la masse.
Invité de l’émission « L’entretien du dimanche » sur Eden TV, ce 15 juin 2025, le député de la mouvance présidentielle n’a pas mâché ses mots. Pour lui, l’appel à “dépoussiérer” la proposition de loi relève davantage de la stratégie médiatique que de la volonté de concertation politique. «L’opposition n’a pas la majorité au Parlement, et il n’y a eu aucune discussion préalable avec les groupes parlementaires», a-t-il souligné avant de dénoncer une démarche «d’effet d’annonce» visant à faire passer les députés de la majorité pour des obstacles à la décrispation.
Pour rappel, la proposition de loi spéciale introduite par l’opposition en 2024 visait à accorder l’amnistie à certaines figures politiques incarcérées, dont Reckya Madougou, ancienne ministre condamnée à 20 ans de prison pour financement du terrorisme, et Joël Aïvo, professeur de droit condamné à 10 ans pour atteinte à la sûreté de l’État. Des condamnations que les intéressés n’ont jamais reconnues, et que leurs soutiens jugent politiquement motivées. Sur ce point, Orden Alladatin reste ferme: il s’agit d’affaires de droit commun, et non de détentions à caractère politique. Il précise d’ailleurs que le texte avait été examiné puis rejeté par la Commission des Lois en janvier 2024 en raison des faiblesses techniques. «Une loi est de portée générale, dans sa structuration et dans sa formulation. Ce texte était insuffisamment travaillé», a-t-il commenté. Interrogé sur la possibilité d’une grâce présidentielle, comme piste de solution, le député a rappelé la position du président Patrice Talon, qui s’est dit “non favorable” à cette option.
Quelques jours plus tôt, le 11 juin 2025, le président du groupe parlementaire d’opposition Les Démocrates, Nourénou Atchadé, avait pourtant lancé un nouvel appel pour relancer la proposition de loi. Son argument était qu’une telle mesure contribuerait, selon lui, à «la décrispation de la vie politique», et permettrait même d’«aider le président de la République à sortir par la grande porte». A cela, le député Alladatin a répondu que: «C’est le peuple qui portera le président en triomphe pour ses réalisations, pas une loi d’amnistie».
Entre exigence de justice, nécessité d’apaisement et enjeux démocratiques, le débat sur l’amnistie a encore de beaux jours devant elle.